Épicé ou grillé ?
La cuisine goanaise est un mélange savant de saveurs épicées de l’Inde du sud et de traditions portugaises qui accompagnent autant les viandes que les produits de la mer. Compte tenu de la situation sanitaire et de l’activité restreinte des restaurants, beaucoup de spécialités n’étaient pas disponibles. Quelle déception ! Mais, pour s’y être aventurés, je peux vous assurer que ça arrache le gosier. Le vindaloo est un plat de poisson très épicé mariné dans du vinaigre et de l’ail, le xacuti est un plat de poulet très épicé cuit dans une sauce au curry rouge au lait de coco, le cafreal est du poulet très épicé mariné dans du massala vert, frit et arrosé de vinaigre de vin de palme. Nous avons goûté les délicieuses saucisses façon chorizo très fort sur un marché. Nous avons vite fait l’impasse sur ces mets « bouche-en-feu », préférant les poissons, les fruits de mer et les crustacés. Le pomfret, par exemple, poisson présent également en Méditerranée, est plat, rond et à chair blanche. De plusieurs tailles, les plus gros sont les plus chers ! Nous avons d’ailleurs été très surpris par le coût élevé de ces produits. Mais manger sur la plage ces délicieux petits poissons, des crevettes et des calamars, grillés ou au beurre d’ail, arrosés de citron vert et parsemés de coriandre, le tout accompagné d’une salade de crudités et de légumes frais, était un vrai bonheur des sens.
Plus élaborés, le soir au Blackmarket ou au Fisherman’s Wharf, les gambas, les langoustes, les bars, rôtis et arrosés d’un « millésime » rouge ou blanc indien, au son d’un bon orchestre, participaient d’une aventure gustative jouissive !

Je garde aussi en mémoire un merveilleux ragoût de chèvre façon osso bucco qui reste inoubliable. Et pour terminer un repas sur une note sucrée, le beblinca, pudding à la noix de coco assez goûteux, s’impose comme le dessert par excellence. On dirait presque un gâteau de crêpes.

Mais c’est dans une des paillotes sous la pinède de la plage de Galgibag que nous avons été séduits. Une tablée de trois amis indiens très décontractés se régalait joyeusement d’huîtres sauvages tout en humant la fumée défendue. Une autre, très baba cool, composée de couples mixtes, faisait de même. Nous avons été accueillis par un mélange d’odeurs d’herbes interdites et de cuisine, au son de musique d’ambiance et de discussions animées. Un jeune serveur souriant nous a apporté la carte en nous proposant la pêche du jour : crabes, huîtres, moules et poissons. Nous nous sommes laissés séduire par des crabes, semblables à nos tourteaux, installés tels les damoiseaux d’une maison close dans des paniers en osier. Préparés dans une julienne de légumes au lait de coco, un rien épicée, ils reposaient langoureusement. Nous leur avons fait leur fête ! Les grosses pinces ne nous ont pas résisté. Sous la carapace, le corail rouge safran, couleur bénie des divinités indiennes, était savoureux et intense au palais. La chair blanche était moelleuse et douce sous la langue, quelle jouissance ! Il nous a bien fallu un bain de mer pour se remettre de tant de plaisir … #onenpincepoureux
Shanti et Sam
Les principes des massages ayurvédiques sont basés sur le travail en profondeur des tissus (la peau, les épidermes sous-cutanés, les muscles et les organes internes) et sur la stimulation du sang et de la lymphe. De ce fait, le flux énergétique augmente, les toxines accumulées dans les muscles sont relâchées et évacuées par le courant du sang. Des huiles aromatisées, sélectionnées individuellement, sont utilisées selon les types de massages. Il existe plus de 26 huiles médicinales contenant chacune entre 7 et 30 herbes qui n’ont aucun effet toxique pour le foie parce qu’absorbées directement dans le sang.
Mais qu’est-ce que l’ayurvéda ? Du sanskrit « ayu » : connaissance de la vie et « veda » : sciences/connaissance, les principes de l’ayurvéda sont le maintien de la santé, la guérison des maladies et la réalisation de soi. Il s’agit d’équilibrer les cinq Mahabhutas qui sont en nous : la terre, l’eau, le feu, l’air et l’espace, créant trois doshas : Vata – espace et air – mobilise les fonctions du système nerveux ; Pitta – feu et eau – connecte la bile pour faciliter la digestion et agit sur le métabolisme du système veineux ; Kapha – eau et terre – concerne les fluides corporels liés aux muqueuses, lubrifiant et source de nutriments pour le système artériel. Quel programme ! Après un massage ayurvédique, notre corps devient un véritable bouclier contre le Mal. On ne peut que se sentir bien alors pourquoi s’en priver ?
En tout état de cause, nous nous sommes adonnés à ces massages – un par jour d’une durée d’une heure trente chacun -, abandonnés aux mains expertes des masseurs de chez Shanti à Mandrem et de celles de Sam à Agonda. Chaque soir, après le coucher du soleil, nous nous précipitions vers ces salons désireux de rééquilibrer nos mahabhutas et réaligner nos doshas. Un travail en profondeur sur notre corps gorgé de soleil avide de caresses musclées qui n’épargnerait aucune partie, à l’exception des intimes (dans notre petit string à usage unique, on était sexy à souhait ! A ce moment-là, le masque n’était pas positionné à l’endroit attendu), de la racine des cheveux au bout de nos orteils, et sur notre esprit afin de le reconnecter à l’univers. Ces massages sont à la fois bons et douloureux. Les mamans ne disaient-elles pas à leurs filles : « Il faut souffrir pour être belle. » Belle mentalité, en effet. Les pressions en profondeur ne sont pas toujours agréables mais font beaucoup de bien, on en ressort en pleine forme, très détendus et prêts pour une soirée agréable. On se sent beau, fort et en bonne santé. On n’a envie que d’une chose, c’est d’y retourner le lendemain. Vous avez compris, on adore ça !
Nous avions choisi trois types de massages : le traditionnel indien qui consiste en de longues frictions à poignes fermes – des mains d’acier dans des gants de velours – afin d’améliorer la circulation du sang et stimuler le système nerveux. Il permet également, en insistant sur les contractures, de défaire les nœuds et de détendre les muscles, rajeunissant ainsi le corps et l’esprit, dixit les brochures. De fait, c’est bon et quel que soit le type de massage, le sentiment de détente fut immédiat.

Les massages poutli et shirodhara étaient les plus surprenants. Le premier consiste à appliquer un linge formé en une boule dans laquelle il y a une douzaine d’herbes. Ce linge est ensuite trempé dans une huile médicinale chaude puis appliqué sur le corps. Cette technique permet de lubrifier les articulations améliorant les problèmes de rhumatismes et allégeant les douleurs dorsales. Le second est tout à fait étonnant : le masseur commence par masser le corps, puis il fait couler de l’huile chaude sur le front en un flot continu, enfin il termine par un massage des pieds. L’huile est contenue dans une petite vasque en cuivre suspendue au fond de laquelle un trou permet l’écoulement du liquide. Une fois positionnée juste au-dessus du front, le masseur actionne une valve et laisse couler l’huile chaude qui se répand sur le front. De temps à autre, « l’officiant » le masse et étale l’huile uniformément procurant un bien-être immédiat. Pour ma part et contrairement à Éric qui s’est assoupi au cours de cette séance, mon ressenti a été de plusieurs ordres. D’abord, la surprise. Comme une éclaboussure chaude qui percute le front. Ensuite, l’écoulement continu sans que je sois maître de l’opération, la température du liquide que je ne pouvais maîtriser et la difficulté à lâcher-prise m’ont rendu incapable de me détendre. Soudain, l’huile était devenue trop chaude et semblait me brûler le front, pénétrant mon cerveau. Je n’étais plus détendu, la sensation de chaleur devenait subjectivement insupportable, j’étais incapable d’évaluer le bien-fondé de ces perceptions m’amenant à dire « Stop ! ». Aussitôt l’écoulement s’est arrêté et des doigts ont doucement frotté mon front comme pour effacer les stigmates de brûlure. Soulagé, je reprenais mes esprits, retrouvais mon calme après ma panique ridicule et me sentais prêt à continuer la séance. Recouvrant une respiration calme, la valve ouverte de nouveau libérant le précieux liquide, je me suis laissé aller, emporté dans un espace serein et réconfortant. #onestzen
31 décembre 2020 à Agonda Cottages
Nous sommes arrivés sur la terrasse du restaurant de notre resort à 21 heures, bronzés, décontractés, bien habillés, la chemise ou la kurta ouverte sur la poitrine, mocassins en daim sur le sable, comme des stars, pensant que ce serait calme. « Vous avez réservé ? », demande le maître d’hôtel. « Euh, non ! On peut quand même dîner ? » Toutes les tables affichaient une pancarte « Reserved » avec le nom et le nombre de convives ainsi que le numéro de chambre. Flottement. Mais grâce à nos sourires naturels et appuyés, le maître d’hôtel, de bonne grâce, a déplacé une pancarte et nous a attribué une table pas trop éloignée de la scène-sur-sable. Fatima, une belle Philippine à la voix extraordinaire, accompagnerait notre repas et nous enchanterait. Nous avons adoré son répertoire magistralement interprété. Quelle artiste ! Ce fut notre premier bonheur.

Précisant au serveur que nous ne voulions pas dîner avant 22 heures, nous avons entamé une première tournée de mojito, puis une seconde, nous laissant envahir par l’alcool. Second bonheur. Passant aux choses sérieuses, je me suis dirigé vers les bacs réfrigérés près du barbecue et j’ai composé notre dîner en accord avec Éric : 8 belles gambas et un gros pomfret grillés accompagnés de légumes frais grillés, beurre à l’ail. La liste des vins étant très limitée, nous avons choisi un Sula blanc indien bien frappé et agréable en bouche. Troisième bonheur. A mes oreilles pourtant sensibles aux bruits, l’atmosphère du restaurant ouvert sur la mer avec les vagues en fond sonore était délicieuse. Les discussions aux tables voisines allaient bon train. Tous les regards allaient de l’assiette à Fatima. Nous étions occupés goulûment et en même temps absorbés par sa fabuleuse présence, faiseuse d’ambiance réussie mettant chez les dîneurs des fourmis dans les jambes, tout comme nous, les incitant à aller danser. C’était parfait. Quatrième bonheur. Vers 23h30, Fatima nous saluait et nous terminions notre dîner. La suite s’enchaînera très vite pour terminer en apothéose …

Il y a peu à dire, les photos sont parlantes. Nous avons transgressé les règles. Nous avons dansé jusque tard dans la nuit, pieds nus sur le sable et dans l’eau, ballotés par les vagues.
Les lumières des projecteurs balayaient des visages extatiques et habités par Sarasvatī, déesse des arts et de la musique, ainsi que des corps en mouvement permanent débordant d’énergie et de vitalité, dans cette discothèque éphémère à ciel ouvert. Nous nous sentions happés dans un tourbillon humain emporté par un DJ diffusant une musique électro-rock-house-funk indienne que nous avons adorée.


Bord de mer surveillé
Nous nous sommes laissés emporter par ce tourbillon de vie, de bonheur et de plaisir jusqu’au bout de la nuit. Dans cette foule sans retenues autant imbibée que nous en alcool, nous avons dansé comme cela ne nous était pas arrivé de longue date. Odeurs. Surtout de joints. Evaporées, emportées par le vent. Transpiration. Les chemises et les tee-shirts collaient à la peau. Contacts. Des groupes de jeunes hommes ondulaient sensuellement avec nous, autour de nous, rares touristes. Nous avons retrouvé le beau réceptionniste et notre masseur, joyeux autant que nous l’étions. Quelle belle ambiance, la meilleure de toute la plage ! #onestfous
